Presse

Méditation des lieux

Extraits

Photo Adrienne Arth

Joëlle Gardes pose d’emblée la question qui la taraude :
« Est-ce cela la vie ? ». Question qui vaut pour l’écrivain comme autrefois, pour le « dernier prieur ». Communauté d’élan. Communauté de doute ? « Écrire à désir perdu ? Prier Dieu à genoux sur la dalle ? ».
Joëlle Gardes choisit d’écrire, « même si les voix qui débordent sont un torrent effrayant ». Écrire dans le silence de la cellule. Accrocher l’écriture au « spectacle incongru » de Saorge. Noter la vie qui continue apparemment identique ― mais peut-être figée ― dans les vieilles pierres du village, dans le chant clair de la fontaine ou derrière les façades austères.
Noter ce qui subsiste, dont l’essentiel n’est plus, qui donnait sens autrefois à la vie.
« La vie comme le lavoir désormais sans emploi ». Et au-delà encore, au-delà des violences infligées aux hommes par d’autres hommes, au-delà des souffrances qui perdurent face à la mort qui guette chacun de nous, de retour au monde clos de la cellule, dialoguer avec le « Poverello » d’Assise, dont les fresques racontent la véritable richesse de la pauvreté. De ce dialogue intemporel avec saint François naît ce début de compassion de l’écrivain pour elle-même et sa joie à s’adonner enfin ― sans résistance et sans reproche ― à l’écriture. Interrogation sur le cheminement intérieur, ce très beau texte de Joëlle Gardes, texte d’une extrême douceur, a inspiré à Adrienne Arth les photos du lavoir et de la fontaine, arrondis caressants de la pierre, murs délavés par le temps, tremblé des eaux et des couleurs.

Angèle Paoli, www. terresdefemmes.com, 2010